Après la crise extrêmement sévère de 2008, les métropoles sont apparues comme des leviers essentiels de la reprise économique. Moteurs de la croissance nationale, elles étaient attendues pour redresser le pays. Leur attractivité auprès des investisseurs, des entreprises, mais également auprès d’une population dite «créative» a contribué au processus d’accumulation ou de métropolisation, aujourd’hui remis en cause.
Depuis plusieurs mois, la crise sanitaire a modifié les attentes envers ces grandes agglomérations. Fragilisées pour certains, hostiles et responsables de nos maux pour d’autres, les métropoles (1) doivent s’inventer un nouvel horizon. Aux injonctions d’attractivité-compétitivité semble se substituer des enjeux d’hospitalité et de résilience.
En matière de flux migratoire, il est souvent admis que les mobilités de longue distance se dirigent d’abord vers la ville-centre, avant d’alimenter les flux résidentiels vers les périphéries. En tant que porte d’entrée sur le territoire, la ville-centre constitue la clé de voûte de l’attractivité métropolitaine.
Tribune
Hospitalité
Une analyse des flux migratoires vers et depuis les aires métropolitaines montre une réalité plus nuancée. Tout d’abord, huit métropoles françaises sur 22 (soit plus d’un tiers) dérogent à ce modèle. Les arrivées sont plus faibles dans la ville-centre que dans les couronnes périurbaines à Paris, Bordeaux, Marseille, et même plus faibles dans la ville-centre que dans les espaces péri métropolitains à Nice, Lille, Metz, Rouen et Toulon. Dans ces huit métropoles, l’attractivité métropolitaine est fortement conditionnée par la qualité des espaces périphériques. Pour les quatorze autres, en revanche, la ville-centre demeure le point d’entrée privilégié. Pour autant des différences demeurent. Ainsi, dans l’aire métropolitaine de Strasbourg, 60% des nouveaux arrivants infranationaux s’installent dans la ville centre, alors qu’ils ne sont que 35% dans l’aire de Grenoble. Si l’on considère à présent les mêmes flux, mais en incluant les arrivées depuis l’étranger, la ville de Grenoble redevient très attractive, notamment auprès des étudiants internationaux.
Raisonnons à présent non plus en termes d’attractivité, mais en termes d’hospitalité. On considère toujours ces flux entrants, mais également la capacité des territoires à retenir les populations déjà installées, ainsi que leur capacité à accueillir tout type de population : des actifs et inactifs, des catégories socioprofessionnelles diverses, mais aussi des populations plus vulnérables, à l’image des jeunes migrants, hébergés par des collectifs citoyens souvent situés en dehors des métropoles. En embrassant la notion d’hospitalité et non plus seulement celle de l’attractivité, les complémentarités territoriales apparaissent essentielles. Ces panachages sont pluriels. Ils peuvent générer de la gentrification et de la spécialisation résidentielle, mais ils peuvent aussi être sources de différenciation, de diversification et de résilience.
Tribune
Ainsi, loin des analyses parfois rapides, souvent utopiques, qui visent à opposer les villes et les campagnes, se conjugue une multitude d’interrelations, plus ou moins durables, équitables et inclusives. C’est sur ces relations proches et lointaines que repose le vivre ensemble dans des espaces métropolisés, mais aussi les leviers d’action pour engager une transition écologique solidaire socialement, mais aussi spatialement.
(1) Les régions ou aires métropolitaines sont définies ici par la Métropole (ville-centre et communes hors ville-centre que nous appelons le périurbain) et leur hinterland situé à 50 km autour de la ville-centre, que nous appelons le péril métropolitain.