Raconter trois siècles d’histoire du racisme et de la suprématie blanche à travers l’assiette : c’est l’objectif de Voracisme, troisième ouvrage du journaliste Nicolas Kayser-Bril, qui paraît jeudi aux éditions Nouriturfu (1). Un essai riche, qui ne manquera pas de faire hurler les contempteurs d’une prétendue «américanisation des esprits» en matière de questions raciales. L’angle peut intriguer, mais il est indéniable qu’à travers l’alimentation se joue une partie des rapports sociaux et économiques : qui produit quoi, comment et au profit de qui ; comment les denrées sont marketées et quelles représentations du monde, quels stéréotypes elles véhiculent ; qui consomme quoi, où, quand, comment, au bénéfice de qui… Ces questions racontent nos modes de vie, mais aussi nos rapports de domination. Notamment racistes.
Produit de luxe
La thèse de Nicolas Kayser-Bril est la suivante : si les théories racistes ont autant prospéré à partir du XVIIIe siècle, c’est notamment parce qu’elles étaient nécessaires pour garantir que la gourmandise des riches Européens soit satisfaite. «Le racisme s’est installé dans la tête des Européens en même temps que le sucre arrivait sur leurs tables. La corrélation n’a rien de fortuit, écrit-il. Ce système de pouvoir fut précisément créé pour que les Européens puissent consommer du sucre la conscience tranquille.» A l’époque, la culture de la canne à sucre puis son raffinement, qui existaient déjà depuis plusieurs siècles, sont extrêmement l