Il faut aller loin. Bien au-delà des kilomètres de littoral coulés sous le béton de Hourghada ou de Safaga. Fuir les chaînes d'hôtels et les magasins de souvenirs et longer la côte, cap au sud, direction Soudan. Puis s'arrêter là, dans cette anse minuscule. A l'ouest, il y a les montagnes de roc et de sable, quatre chaînes de silhouettes grises déchiquetées dans un théâtre d'ombres. Fondues le soir dans la brume, elles vibrent ocre le jour, dans les ondes de chaleur. Arides et hostiles, seuls les arpentent des chameaux entravés, des troupeaux de chèvres et leurs gardiennes discrètes, rapides et légères malgré le soleil.
A l'est, il n'y a que du bleu. Du bleu d'eau, bleu de mer ; marine et pétrole quand ciel et flots se confondent à la brune, balafré d'argent quand la lune s'y reflète. Le port de Quseir est ancré là, depuis des temps immémoriaux, riche d'une histoire tumultueuse aujourd'hui oubliée. C'est d'ici qu'Hatchepsout, la reine-pharaon, lança son expédition vers le royaume de Pount, dont le récit est gravé sur les murs du temple de Deir el-Bahari, à Louxor. Les Ptolémées et les Romains eux aussi comprirent l'intérêt de cette porte d'entrée sur la mer Rouge, étape essentielle de la route des épices. Plus tard, Ayyoubides et Mamelouks accordèrent protection et bénédiction à ce lieu, dernier passage terrestre des pèlerins avant d'embarquer pour La Mecque. Mais la création du canal de Suez à la fin du XIXe siècle mit fin au règne de Quseir. Les pèlerins partis, une usine d