Passée cette barrière nuageuse, l'île, découverte par les Portugais en 1419, s'avère pourtant être un joyau accueillant où le soleil perce les nuages, donnant à l'endroit un climat et une douceur particulière. Lieu de refuge où de repos, les rois et les empereurs, les riches commerçants et les nobles aimaient y séjourner. Etape vers les Amériques, grenier et cave à vin du Portugal, elle vécut au XIXe et XXe siècle les soubresauts du commerce, des épidémies et des crises migratoires ainsi que l'accroissement des inégalités entre villes et campagnes. Aujourd'hui autonome, Madère s'est résolument tournée vers le tourisme. Et si les hôtels de luxe sont rarement complets, l'île attire un nouveau public qu'elle sait séduire. Visite.
Téléphérique
Pour atteindre notre hôtel, situé dans les hauteurs de Funchal, la capitale, il fallait trouver un moyen de transport. Le choix s’effectue entre des bus madériens dont la dangereuse réputation n’est pas erronée et le téléphérique installé sur le front de mer. On opte pour le second: ses petites navettes qui montent se percher dans les hauteurs de la ville ont un côté spectaculaire: entre mer à perte de vue et montagnes qui se rapprochent.
La ville de Funchal est venue s’agripper au rocher madérien, avec son agriculture en terrasse et ses maisons posées sur des socles. Sous nos pieds celles-ci ressemblent à des jouets d’enfants. Certaines ne sont pas finies, d’autres abandonnées, les piscines ne sont pas toutes remplies. Parfois une belle et grande maison se distingue des autres, bien entretenues, à la terrasse et aux plantations impeccables.
Un second téléphérique permet d’accéder au jardin botanique. Celui-ci ne se déroule pas dans le même type de décor, il est moins urbain, accroché à ce fil, le vide se trouve sous nos pieds. La forêt englobe le décor de ce rapide voyage. A nos côtés on peut apercevoir les chemins de randonnées, quelques touches rouges ou bleues qui nous rappellent à l’ordre et nous donne la preuve qu’une présence humaine subsiste dans cette espace à l’aspect sauvage. La descente peut se faire en panier d’osier, poussé par des Madériens habillés de blanc. En attendant les touristes, ces derniers tuent le temps en jouant aux dominos, aux osselets ou en regardant le foot dans un bar.
Jardin botanique
L’atout de l’île a toujours été sa végétation exponentielle. Les jardins de Madère sont réputés pour leurs plantes verdoyantes et particulièrement variées. L’île possède un climat particulier, humide et régulièrement ensoleillé, qui permet le déploiement d’une flore digne de celle de la Genèse. Les jardins regorgent de variétés du monde entier, rapportées par les nombreux marins qui faisaient escale sur la route des Amériques. Aujourd’hui, les jardins sont des espaces suspendus hors du temps, de la folie urbaine et de nos mondes en constante accélération.
Dans le Jardin Tropical de Monte, les mondes s’entrecroisent. On y trouve une influence asiatique dans le style des ponts et de quelques structures architecturales du jardin. Entre deux arbres, on peut même rencontrer un bouddha silencieux et calme. L’Afrique est mise à l’honneur au sein du Musée où les statues et les masques cohabitent avec un grand nombre de pierres. Une grande collection de minéraux y est exposée. Le Jardin tropical entretient aussi une collection de céramiques aux couleurs blanches et aux dessins bleus, mise en valeur par la végétation qui lui sert de cadre.
Le front de mer
La mer joue un rôle important dans l’histoire de l’île, longtemps isolée au large du Maroc. Elle est son lien avec l’extérieur. Son économie a longtemps reposé sur l’exportation, aujourd’hui elle se transforme pour se nourrir du tourisme. Les paquebots de croisière déversent régulièrement leurs flots de visiteurs sur les côtes de Madère. Sur le front de mer, des pelouses verdoyantes agrémentées de sculptures constituent le décor d’arrivée de ces bateaux. Au détour d’une figure abstraite, on peut croiser un bronze de Ronaldo, héros de l’Euro, fièrement tourné vers la mer. Pour atteindre les espaces de baignades de Funchal, on empruntera la rue Santa Maria, zigzaguant entre street-art et restaurants pittoresques. Un mélange de styleset d'époques, toujours bordé par les jardins et les forets denses, bien représentatif du foisonnement et des goûts de l’île.
Vincent Gressard / Flickr