En descendant vers le Sud-Est du pays, les champs de blé défilent de chaque côté de la route, brûlés par un soleil au zénith. La monotonie de grandes plaines ondoyantes est interrompue par des affleurements rocheux et des forêts de chênes-lièges, aux formes tourmentées. En chemin, la traversée de patelins déserts donne une sensation d’abandon. Grand comme la Belgique, l’Alentejo est la région la moins densément peuplée du pays. Si les Portugais affectionnent son littoral, ils délaissent bien souvent l’intérieur des terres, rebutés par ses températures caniculaires en été. C’est pourtant au cœur de ces paysages burinés que se révèle une région attachante.
Crédit: Honza Soukup / Flickr
Taches blanches dominant une immensité ocre, les villes en hauteur de l'Alentejo semblent guetter un ennemi invisible derrière leurs murailles. La plus célèbre d'entre elles est Évora. Cernée de remparts, la capitale de l'Alentejo est un livre d'histoire à ciel ouvert où se mêlent influences romaines, mauresques et médiévales. Ses ruelles biscornues, ses arcades, ses jolies places et ses fontaines dégagent un charme suranné. Un peu à l'écart du circuit touristique de la ville, le Largo d'Alvaro Vehlo est un havre de paix à l'ombre des jacarandas. Il fait bon s'y asseoir et regarder passer les habitants, à l'allure tranquille. Quelques étudiants, portant fièrement la cape noire et l'habit, se rendent à l'université, fondée par les Jésuites au XVIe siècle, juste avant que l'Espagne n'annexe le Portugal.
En quittant Évora vers l'est, vallons et collines prennent de l'altitude. La frontière espagnole se rapproche. Des tours de guet du Forte da Graça, citadelle à la Vauban dominant la petite ville de garnison d'Elvas, l'Estrémadure est à portée de main. Une quinzaine de kilomètres sépare Elvas de sa voisine espagnole Badajoz. En visitant la forteresse, quasiment intacte depuis sa construction au XVIIe siècle, on est fasciné par le génie militaire du site, avec ses 3 lignes de défense, ses remparts à douves sèches en formes d'étoiles et ses innombrables pièges, la rendant imprenable. La découverte des cellules, où les prisonniers étaient enfermés pendant des semaines sans voir le jour, fait frissonner surtout lorsque l'on apprend que le Forte da Graça fut l'une des plus terribles geôles du Portugal sous la dictature de Salazar.
Retour à la lumière sous un ciel bleu sans nuage dans les rues d’Elvas. Comme dans tous les villages de l’Alentejo, un labyrinthe de venelles dallées s’ouvre sur des petites places inondées de soleil. Les maisons blanches aux murs chaulés sont surmontées de toits en tuiles, encadrées de fenêtres et de portes aux contours bleus ou jaunes. À quelques kilomètres, Monsaraz s’accroche à un éperon rocheux au dessus des eaux bleues du lac d’Alqueva. Dans cet adorable village, interdit aux voitures, la blancheur est presque grecque, rehaussée de bougainvilliers exubérants qui dégringolent le long des murets. Quelques touristes arpentent le pavé de guingois, des vieilles dames assises sur un banc observent le passant. Le temps se dilate.
Crédit: Rui Ornelas / Flickr
De l’eau et des étoiles
Si l'Alentejo est d'abord une succession de plaines arides, l'eau n'est pourtant pas absente de la région. Une étonnante mer intérieure, reliée au fleuve Guadiana, a été créée il y a une quinzaine d'année. Engendré par la construction d'un barrage, le lac d'Alqueva est la plus grande inondation artificielle d'Europe. Ses eaux s'étendent sur 250 km2, là où il y avait autrefois des champs, des oliviers mais aussi une bourgade, Aldeia da Luz. En naviguant sur ce miroir, qu'aucune ride ne vient troubler, il est étrange d'imaginer qu'un village englouti se trouve au dessous… Quelques voiliers glissent sans bruit, un bateau à moteur s'éloigne, traçant une gerbe d'eau, tandis que la lumière décline doucement.
Bientôt, la nuit se fait noire. Sur les routes autour du lac, l’éclairage est presque inexistant. Cette absence de pollution lumineuse vaut à la région la certification «Starlight Tourism Destination«. Visible à l’œil nu, la voie lactée est encore plus éblouissante de la lunette d’un télescope. Ouvert il y a peu, l’observatoire du lac d’Alqueva propose des soirées d’observation des étoiles animées par un jeune astrophysicien passionnant, qui emmène les voyageurs bien au delà des frontières de l’Alentejo.
Pratique
Y aller avec Comptoir des Voyages
Vols directs quotidiens de Paris-Orly vers Lisbonne avec la compagnie Aigle Azur à partir de 47€.
Manger
Gadanha Mercearia, une épicerie-restaurant dans la jolie ville d’Estremoz. Les plats traditionnels de l’Alentejo sont revisités avec beaucoup de talent dans un décor contemporain chaleureux.
Dormir
Horta da Moura, reconstitution d’un monte alentejano (maison traditionnelle) avec une splendide piscine en pleine nature. L’hôtel idéal pour découvrir Monsaraz et le lac d’Alqueva à proximité. À partir de 120 € la nuit
Regarder les étoiles
Observatório Lago Alqueva, à la sortie de Monsaraz.