Pendant quelques mois, Laurent Jalabert n'a plus osé se laisser
aller en public, à cause de ses dents perdues lorsqu'il s'est fracassé la machoire dans le sprint d'arrivée d'Armentières, aux premiers jours du Tour de France 94. Mais hier, il a offert son plus beau sourire à la victoire: simple et heureux d'être enfin récompensé, il a remporté Paris-Nice au terme d'une semaine de course toute méthodique.
Il en était même encore presque surpris. Parce qu'on avait pris l'habitude de ne le voir qu'en sprinter, lui qui a gagné en chien fou des arrachées finales et fugaces la quasi-totalité de ses bientôt 50 succès professionnels. Mais là, étouffé de fleurs à l'arrivée dans la ville du Carnaval, il s'est révélé un coureur nouveau à l'image de son nouveau visage. Il a construit son succès loin des coups de sang des 300 derniers mètres, en 8 étapes désormais dominées de sang froid. «Je suis surtout content de la manière dont j'ai gagné cette semaine, c'est quelque chose de nouveau pour moi. J'ai été à la hauteur partout, jusqu'au chrono final!» rigolait-il d'aise à l'arrivée.
Ce 62e Paris-Nice, la grande ouverture de la saison française, promettait de s'offrir les premiers jours au roi des sprints du printemps, l'Italien Mario Cipollini, puis sans doute au Suisse Alex Zülle, spécialiste des grimpettes et du contre-la-montre du dernier week-end. Cipollini forfait au départ, et Zülle vidé par une gastroentérite, Laurent Jalabert s'est ouvert la route dès le deuxième jour, en remontant la