Roubaix,
Envoyé spécial La foule est debout comme à son habitude. Bien sûr, elle aurait aimé chavirer de bonheur et faire la «ola», essuyer une larme furtive et se tomber dans les bras en voyant une troisième fois son «Duclos» arriver en conquérant sur ce vélodrome de Roubaix. Mais, là, elle sait que l'homme solitaire qui vire à droite pour attaquer la piste en résine est sûrement celui qui mérite le plus d'inscrire son nom à la 93e édition de la classique.
Il y a deux ans, sur cette même piste, Franco Ballerini s'était laissé bluffer par un Gilbert Duclos-Lassalle pourtant au bout du rouleau. Paris-Roubaix s'était alors mis à meubler ses nuits blanches. L'an passé, elle lui avait encore glissé entre les doigts, troisième derrière le Russe Andrei Tchmil et son compatriote Fabio Baldato.
Ballerini aime tant Paris-Roubaix qu'il avait fini par la haïr. Le sort semblait tellement s'acharner sur sa grande carcasse que le coureur florentin finissait pas ne plus y croire. Dégoûté, il lâchera même un jour: «Ma grande faute, ce fut de croire que je pouvais devenir un grand champion.» Paroles outrancières de celui qui se dit «prisonnier des pavés par amour».Cette fois, il peut serrer un poing rageur. Ils sont loin, ceux qui l'ont humilié, ces huit centièmes de secondes de 1993 ou cette nouvelle photo finish de l'an passé qui le priva de la victoire dans Gand-Wevelgem au profit de Wielfrid Peeters. Aujourd'hui, sous les yeux d'un Balladur toujours aussi coincé et qui applaudit à contre-t