La bâtisse du Club Bosna, qui surplombe de ses quatre étages une ruelle en escalier pavé, est l'un des rarissimes bâtiments de la ville intact après trois années de bombardements. Ces égards sont d'autant plus curieux qu'elle voisine, au coeur de la ville autrichienne, avec le ministère de l'Intérieur, une station de police et la présidence. Peut-être cet endroit familier des Sarajeviens, comme le Stadium de football, encore plus exposé et jamais touché par aucun obus lui non plus, suscite-t-il une mansuétude de la part des artilleurs serbes, nostalgiques du bon temps de Sarajevo.
Dès l'entrée, le Club Bosna s'apparente à un club de foot. En bas, une cafétéria accueille joueurs, entraîneurs et supporters qui évoquent les grandes parties d'antan autour d'une bière ou d'un café. Sur les murs des couloirs sont inscrites en grandes lettres des dates mémorables. A l'étage au-dessus se trouve la pièce des trophées et des coupes. En haut, les bureaux des dirigeants sont meublés comme des bureaux de ministres. Partout sur les murs sont accrochés des fanions, des articles de journaux, des photos d'équipes et de grands joueurs. Mais ici les joueurs portent des chemises acryliques sous des blousons de cuir. Le Club Bosna est un club d'échecs, qui a décroché le titre de champion d'Europe, en pleine guerre.
Trois mois plus tard, un samedi après-midi de printemps, les sirènes intempestives, de même que l'écho lointain des explosions de roquettes, nous rappellent que nous sommes toujours dan