«Mon père a arrêté de jouer au rugby quand je suis né.» Dans la
position du penseur de Rodin, Richard Dourthe, les lèvres pincées, le regard en dedans sous des sourcils qu'il fronce ou qu'il relâche, est face aux projecteurs. Loin d'être un poseur, il se cherche une contenance face à l'objectif de l'appareil qui creuse dans ses traits anguleux. On le croirait en train de subir un interrogatoire en règle: «Je peux m'asseoir?»
Richard Dourthe, en l'espace d'une tournée en Argentine et d'un test match d'anthologie contre les All Blacks, est devenu le symbole d'une équipe de France rajeunie et accrocheuse. Lui n'a pas puisé bien loin dans ses nerfs à vifs pour trouver l'énergie nécessaire à justifier le choix de Jean-Claude Skrela qui lui a fait endosser le maillot d'une idole de jeunesse: le numéro 13 de Philippe Sella. «Je ne me suis pas posé de question, je ne suis pas pour les questions inutiles.» De modèle, il serait vain de vouloir lui en trouver. Même pas son père, Claude, 33 fois international, au centre lui aussi. Un parallèle obligé qui fait dire à Richard: «A la fin c'est barbant, mais c'est bien, en même temps.» Ce père, connu dans le monde entier pour sa course épaules rentrées, légèrement voûté, le nez terriblement busqué, un caractère à manier avec des pincettes, surnommé affectueusement «le chameau» par ses coéquipiers, s'est découvert un fils élégant, fin, le front haut à la Cantona, mais dépourvu de la morgue de ce dernier. Surtout, Richard est disposé à mettre