L'international de rugby français est un personnage généralement
chaleureux, plutôt intelligent, en bonne santé mais avec une légère tendance schizophrène. Il ne peut rêver très longtemps sans qu'on le secoue brutalement pour le plonger dans une réalité appelée championnat de France. Se prend-il au jeu, recommence-t-il à rêver de printemps heureux avec son club, qu'il doit s'ébrouer à nouveau dans une autre réalité au doux nom de Pays de Galles.
Ce dédoublement de la personnalité était perceptible mercredi lors du premier entraînement de l'équipe de France qui s'envole aujourd'hui pour Cardiff. Elle jouera demain son dernier match d'un Tournoi des Cinq Nations qu'elle peut remporter si elle gagne contre les Gallois. Les Français compteraient alors trois victoires, à égalité avec les Ecossais et sans doute les Anglais qui devraient balayer les Irlandais. Mais leur goal average en ferait les vainqueurs du trophée. Il y a quelques années encore, une telle situation aurait donné trois vainqueurs ex-aequo. Une volonté de faire neuf a introduit ces décomptes pointilleux alors que l'exacerbation actuelle de la compétition mondiale dans les deux hémisphères laisse penser que seul importe de remporter le grand chelem dans le vieux tournoi.
Ces calculs d'apothicaire ne déchaînent donc guère l'enthousiasme. Quatre semaines après leur succès euphorique contre l'Irlande, on percevait mercredi chez les joueurs français comme une difficulté à entrer dans cette peau de vainqueurs aux points. C