Salué par un Christ qui n'en finit pas de grimacer sur sa croix,
Johan Museeuw a vécu hier son calvaire dans les pavés du mur de Grammont, qui clôt le Tour des Flandres. Le Flamand a senti son vélo se dérober, une roue voilée sans doute, à force de tordre la machine dans les rigoles. Une troisième victoire envolée, certainement, puisque passer en tête en haut de cette côte meurtrière présage presque toujours du succès, sur la ligne d'arrivée de Meerbeke, vingt kilomètres plus loin. Museeuw le sait, il a déjà fait deux fois le coup, mais, hier, il a dû laisser filer l'Italien Michele Bartoli.
Le Toscan était l'un des prétendants, hier matin, à l'aube de 267 kilomètres. Quatre-vingts ans que «De Ronde», comme on l'appelle ici, couronne les coureurs les plus fringants du printemps. Ses seize côtes feraient sourire les grimpeurs si, à force de s'y heurter de front, au détour d'un labour ou d'une haie dénudée, ils ne devaient aussi se battre contre le vent et les cailloux ramenés au milieu des petites routes par un dernier tracteur.
Bartoli a beau être italien, il aime tout cela, mais sait qu'il faut s'économiser. Johan Museeuw impose son train dès les premiers raidillons. Dans la côte du Vieux-Quaremont, qui bombe ses pavés entre deux talus de mousse, puis dans celle du Patersberg, ses compagnons de l'équipe Mapei emmènent la course. Si bien que, de mont en mont, De Ronde se décante. A une trentaine de kilomètres de l'arrivée 30 coureurs, sur les 185 au départ, laissent enfin écha