Aix-les-Bains
envoyé spécial Dans les allées de gravier qui bordent la saline royale d'Arc-et-Senans, un frisson d'air chaud passe aux portières. Mauvais présage. Le temps est lourd, les coureurs sentent venir l'orage. Ils l'ont plutôt saumâtre. Après une semaine hivernale dans les plaines du Nord, il ne leur manquait que ça. Ils en causent, résignés, profitant de la brève éclaircie matinale. Ils ont les bras aux fenêtres des voitures, les cuissards relevés, la tête nue, l'air inquiet. Certains ont le corps moulu, d'autres sont fiévreux. Lance Armstrong, mal rasé, blême sous le hâle, frissonne et regarde au loin: «J'espère que ça va se dégager», dit-il, un doigt sur la gorge. L'Américain n'imagine pas quelles ténèbres il va traverser. Cyril Saugrain non plus. Peu avant midi, l'attaquant bienheureux d'Aubervilliers cherche encore le souvenir de sa victoire dans le regard des badauds. Il s'amuse. Au soir, les trombes d'eau l'ont emporté. Comme ses équipiers Pontier et Teyssier. Et Armstrong, Robin, Seigneur, Bramati, Zberg, Calcaterra... Ils n'ont pas eu la force d'aller jusqu'aux rives du lac du Bourget où les rescapés, livides, épuisés, fendent comme des chats maigres la foule immobile. «Cinq heures sous une telle pluie, ça ne m'est jamais arrivé», dit le jeune Cédric Vasseur qui s'est accroché pour défendre le maillot jaune de Stéphane Heulot. «Le plus dur, c'est le froid. Toute la journée. Je me suis cru au mois de mars. Je ne sais pas combien de temps on va tenir!» Pour s