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Libération

Là-haut sur le plateau, le nid d'as kenyansLes champions du fond et demi-fond vivent, s'entraînent et courent en famille.

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publié le 29 juillet 1996 à 7h42

La famille de

Saint-Patrick En fin d'après-midi, la voiture d'Ismael Kirui s'est garée devant les hortensias du Frère Colm O'Connel. Cinq champions endimanchés en sont sortis, dont Rose Cheruiyot toute fine dans sa robe démodée. Ils venaient de marier Catherine, la petite soeur d'Ismaël. Le seul du groupe à ne pas courir, c'est le nouveau mari. En le saluant sous la véranda, Ismael a assuré à Frère Colm qu'ils n'avaient bu que du soda et qu'ils seraient à l'entraînement le lendemain matin, comme prévu. Saint-Patrick, c'est leur maison à tous. Rose en a une, à elle, mais la plupart du temps, elle préfère vivre dans une petite chambre du bâtiment préfabriqué qui jouxte la maison du frère patricien. Entre deux épreuves en Europe, elle s'entraîne ici, dans les collines d'Iten.

Frère Colm accueille toutes ses ouailles, champions ou débutants, avec la même sollicitude. Au petit jour, il promène sa silhouette ronde au milieu d'adolescents longilignes venus pour un stage durant les vacances scolaires de la mi-avril. Il connaît les noms, les villages d'origine, et parfois même la taille et le poids de mémoire. «Regardez la fille la plus rapide du monde.» Colm n'est pas peu fier de montrer Lydia Cheromei: après seulement deux ans chez lui, elle a été championne du monde de cross country en 1991, à 14 ans. On tourne la tête pour admirer la gazelle et on surprend une jeune femme en fichu en train de faire sa lessive sur la pelouse. Comme Rose, Lydia squatte à Saint-Patrick. En famille.