«Cinquante-neuf jours après le départ, le point du 19 octobre nous
place à une quarantaine de milles du cap des Aiguilles, pointe extrême de l'Afrique du Sud. ça me fait chaud dans la poitrine ce petit éclat du phare entre le noir des lames. Chaud dans la poitrine et un peu froid dans le dos... car ce cap est un grand cap.»
Aucun des solitaires du Vendée Globe n'aurait l'idée de venir saluer les caps de Bonne Espérance et des Aiguilles. Mais, en 1968, pour Bernard Moitessier, engagé dans le Golden Globe, la première course autour du monde de l'histoire, la compétition n'est que le prétexte d'un voyage initiatique dans le sillage des cap-horniers du XIXe siècle. Moitessier est le plus connu des marins qui mettent le cap vers le Grand Sud. Quand il vient reconnaître le cap des Aiguilles, 5 des 9 solitaires ont déjà abandonné. Dans le Grand Sud, où il est de règle de faire le gros dos dans les éléments, il n'hésite pas, en pleine tempête, à laisser son monocoque partir en surfs échevelés.Après avoir viré le Horn, de retour dans l'Atlantique, le skipper de Josuah est quasiment certain d'établir le meilleur temps. Mais, le 18 mars 1969, par un message catapulté à une vedette, il apprend aux organisateurs qu'il a décidé de poursuivre son voyage: «Je continue parce que je suis heureux en mer et peut-être pour sauver mon âme.» Par ce refus de rallier «le monstre» la civilisation industrielle , il est non seulement en phase avec la jeunesse d'alors, mais il paraphe également une for