Lundi 3 février
par 11°55 sud et 30°19 ouest Un bonheur ne vient jamais seul, le soir qui tombe amène et un semblant de fraîcheur et une meilleure orientation des vents. Comme les papis prennent le frais dans le Midi en traînant leur chaise dehors, je m'installe dans un coin du cockpit pour regarder le jour tomber, avec cette rapidité propre aux tropiques. Je sais que je dois dormir tôt, pourtant, car la deuxième moitié de la nuit sera consacrée à la veille des grains qui se forment, à regarder dériver lentement ces grosses masses sombres, lourdes de pluie, qui dégagent l'odeur fade de l'eau douce. Encore ensommeillée, il faudra jouer au jeu délicat d'évaluer leur trajectoire, éviter les survents qui vont coucher le bateau, peut-être prendre un ris, peut-être deux, mais le plus tard possible pour ne pas trop ralentir... Jeu délicat où l'on peut risquer le démâtage si le grain est vraiment violent.
Pour le moment, ce soir, regardant la nuit envahir la mer, c'est l'heure du bilan de la journée, où l'on consulte la carte comme une flânerie, pour découvrir des villes aux noms exotiques, Caravelas..., Ileus..., Aracaju..., dont on croise la latitude. J'imagine ce même coucher de soleil, là, tout près, sur la terre brésilienne, les vendeurs ambulants qui plient bagage, les stades de foot qui s'éclairent, les bars qui se remplissent, la vie, là, tout à côté, qui ignore que je passe solitaire au large. Je me souviens du carnaval de Salvador de Bahia, la foule, la danse, les trios ele