Chaque match du Tournoi des cinq nations, même quand il s'agit de
celui du grand chelem, commence le lundi par un rituel, immuable comme il sied à un rituel. Les joueurs français se rassemblent au siège de la Fédération française de rugby, 9, rue de Liège, Paris, et les Brivistes arrivent toujours les premiers. Une géopolitique sommaire conclurait à l'existence de clans (Brivistes, Toulousains, Agenais, Dacquois...). Une ethnologie approximative dessinerait un rite de la prééminence. Il n'y a pourtant que la loi très primitive des horaires combinés du train et de l'avion, qui fait que Merle, 1,98 m, 125 kg, mâle donc très dominant, arrive pourtant toujours le dernier.
Hier, malgré tout, ni l'ethnologue, ni le géopoliticien n'auraient pu tirer la moindre conclusion. Les joueurs n'ont pas eu besoin de cette espèce de station pour oublier le match du week-end en championnat et rentrer dans leur peau d'internationaux. Ils arrivaient et l'équipe de France se formait. «Je ne connais pas un joueur qui ne pense pas à l'Écosse depuis une semaine, a dit Richard Castel. D'habitude, on rentre d'un match du tournoi et on redevient joueur de club. Là c'était assez curieux. J'étais joueur de club et de l'équipe de France.»
Le match contre l'Écosse a déjà commencé et ça ne s'entend pas aux conversations entre joueurs. Ça se détecte dans un mélange de décontraction et de sérieux. Cette équipe, partie éclopée à la mi-janvier, se retrouve favorite, avec le grand chelem décennal en vue. Mais sans