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Libération

A Kinshasa, le ring est au zoo. Les boxeurs s'entraînent et livrent combat dans la fosse aux ours.

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publié le 22 mai 1997 à 2h17

Kinshasa envoyé spécial

Kilemba Mutombo entraîne les boxeurs dans la zone de la Gombe à Kinshasa. De toute sa bande du Kassembo Club, cet ancien poids mouche de Bandoudou est bien le seul à connaître son poids. Le seul aussi à posséder des gants, râpés. De sa longue carrière dans la région de l'équateur, Kilemba a sauvegardé une casquette à visière, un débardeur rouge, un pantalon de survêtement, un sac, d'où il extirpe deux paires de gants, et un diplôme d'entraîneur national, géant et manuscrit en lettres d'instituteur. Son seul patrimoine sur cette terre tient dans ce sac de skaï et dans ce regard rieur.

L'espoir du Boxing Club de Kassembo s'appelle Alain Diava, de Kenge, sur la route de l'intérieur. Silhouette osseuse, longues mains souples, muscles en lame de couteau, il ne se soucie pas de son poids, ne se souvient pas de sa date de naissance. Il raconte, visage rêveur: «J'ai été poussé à la boxe par mes grands frères. Ils pensaient que je pourrais y trouver mon compte. Le matin, je traîne au marché. Les gens savent que je suis boxeur, ils me donnent à manger. L'après-midi, je me repose. Je loue une chambre avec trois boxeurs et un catcheur. Le soir, après l'entraînement, je visite les amis. Après minuit, quand le quartier se calme, je m'endors.»

Ni haltères, ni punching-ball. Pour s'échauffer, faute de corde à sauter, les boxeurs sautillent en ronde, se tenant par les mains. Pas de mur, pas de pendule, pas de gong: les exercices sont rythmés par les coups de sifflets de