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Libération

Le peloton ne prend plus langue avec l'argot. Dans le Tour, la communication se verrouille.

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publié le 19 juillet 1997 à 5h49

Saint-Etienne envoyé spécial

Les vieux suiveurs du Tour de France disent qu'on pouvait, en n'usant que de lui, tenir une conversation qu'un étranger au vélo ne pouvait comprendre. On peut dire aujourd'hui que cet argot du peloton est une langue morte. Claude Sudres, un des plus anciens suiveurs du Tour, après en avoir été le responsable presse, a recensé le vocabulaire le plus fleuri dans son Dictionnaire international du cyclisme. Il l'a placé en pages jaunes, forcément, au milieu du dico, comme on trouve les citations latines dans les pages roses des vieux Larousse. Pour Claude Sudres: «C'était une langue d'invention. Elle ne s'enrichit plus depuis quelques années et elle est de moins en moins parlée dans le peloton, ceci expliquant cela. Il reste les expressions qui sont passées dans le langage courant. Mais il n'y a plus d'invention.»

Cette langue riche vivait de la proximité des coureurs et des journalistes. Les uns la parlaient, les autres la cultivaient, et les bons soirs, tous l'inventaient. Une langue d'images rapides et frappantes, élaborée conjointement par les coureurs et les journalistes. Lancé par des patrons de presse, le Tour, né pour vendre des journaux, a longtemps laissé croire que les deux métiers étaient embarqués dans la même galère. Ça créait des complicités. On ne dira plus: «A force d'avoir la selle dans le trou du cul, il est passé par la fenêtre et il va finir par monter dans le balai.» Trop de monde suit le Tour de France, l'hébergement est atomisé