Marcel Truy, 68 ans, camarade d'Abel depuis plus des lustres, a vu
le jour dans cette «cité espagnole». Fils de menuisier, ses parents sont arrivés à la Plaine en 1922. «J'étais tellement lié à ces gens que lorsque je jouais au fooball dans ma jeunesse, on m'appelait "l'Espagnol alors que j'étais le seul Français de l'équipe», raconte Marcel, toujours versé dans le foot puisqu'il est aujourd'hui président du club Plaine Renaissance, riche d'une équipe qui n'a pas attendu l'arrêt Bosman pour recruter des joueurs de tous les horizons. Une façon de perpétuer la tradition du quartier. «C'est vrai que l'endroit était typique. Une commerçante que tout le monde nommait "la Vosgienne, avait d'ailleurs appris l'espagnol pour pouvoir continuer à prospérer», ajoute-t-il. Cette enclave ibère cohabitait néanmoins très bien avec «l'extérieur». Pas de racisme, «juste des petites railleries à l'école, mais rien de plus que celles que peuvent dire des enfants en bas âge», raconte Françoise, la femme de Marcel. La guerre d'Espagne provoque des nouvelles arrivées dans le quartier à la fin des années 30. Le père de Françoise, anarchiste pur et dur, recueille comme quelques-uns de ses compatriotes des réfugiés politiques. Mais la construction de logements sociaux en août 1944, jusqu'en 1970, métamorphose l'endroit. «Aujourd'hui, il n'y a plus qu'une dizaine de familles espagnoles de notre génération», regrette Marcel. «Avec Abel, nous ne voulions d'ailleurs pas du Stade de France, car nous avi