Quand l'adversité est si loin de son propre sillage victorieux, les
marins sont généralement plus bavards. On assiste donc généralement à des confessions assez éclairantes sur l'aventure qui s'achève. Yves Parlier, le skipper d'Aquitaine Innovations, et qui signe dans la Route de l'or la plus incontestable de ses victoires, a soufflé, une fois que le monocoque était à quai du Corinthian Yacht Club de Tiburon, au nord de la baie de San Francisco: «La fin a été très longue, avec un certain ras-le-bol parce qu'on n'avait plus la pression des concurrents après le pot au noir atlantique. Et puis, pendant cinquante-sept jours, 24 heures sur 24, gérer tous les problèmes techniques qui se posent et faire en sorte que l'équipage reste motivé, c'est pas évident sur un bateau qui n'est pas du tout prévu pour la course en équipage.» Bonne entente. Parlier veut dire par-là que la vie communautaire, sur une si longue période, est une bien curieuse expérience où se mêlent tantôt haute voltige maritime et tantôt basses corvées ménagères: «Cette course en équipage, c'était un nouveau défi pour moi. Je suis très heureux que tout se soit bien passé entre nous. Lalou [Roucayrol] s'occupait de la maintenance. Hervé [Jan] supportait toutes les tâches ingrates: vaisselle, rangement; et Thomas [Coville] s'occupait des voiles et cordages. Ainsi j'ai découvert Hervé Jan qui n'a jamais rechigné à barrer des heures, notamment lors du passage du cap Horn, tel un roc.» Légèreté. Mais par-delà ces légers