Le Cap envoyée spéciale
C'est à peine un stade. Plutôt un immense terrain vague entouré d'un mur de béton. La terre est grise et boueuse, usée par le piétinement des équipes qui s'entraînent toutes au même moment. Derrière les murs, on devine des baraquements en tôle d'où s'échappe la lourde fumée des feux de charbon qui brûlent toute la journée. L'odeur âcre imprègne le stade et prend à la gorge. A intervalle régulier, un grondement rugit dans le ciel et couvre les cris des joueurs: ce sont les avions qui décollent de l'aéroport tout proche. Dans cette township de Nyanga, à une quinzaine de kilomètres de la ville du Cap, le stade a été construit au coeur du bidonville. Dans un océan de tôle ondulée poussiéreuse. C'est la zone noire du Cap, créée sous l'apartheid à une distance soigneusement calculée du centre-ville. Suffisamment loin pour ne pas embarrasser la minorité privilégiée qui bénéficiait d'un confort occidental. Et à chacun son stade: les blancs du Cap avaient le leur à proximité du centre-ville, les noirs, ont obtenu celui de Nyanga.
Depuis la fin de l'apartheid, l'Afrique du Sud a rompu son isolement. A la pointe du continent africain, la ville du Cap est redevenue une destination touristique. Le pays est à nouveau fréquentable. Le sport aussi a bénéficié de la fin du boycottage international, en 1992. Et cette année pour la première fois, l'Afrique du Sud participe à la Coupe du monde. Mais c'est bien loin des plages dorées et des gratte-ciel en verre du centre-