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Libération

Derrière le pilier. Eclairs de Belfast

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publié le 11 janvier 1999 à 23h29

Serge Simon, pilier du Stade français, raconte la saison

internationale pour «Libération».

Lorsque je m'échauffais seul, dans l'en-but de Ravenhill, il m'apparut une évidence qui ne se démentit malheureusement pas pour nous au terme de ses quatre-vingts minutes de ballade irlandaise. L'évidence que les quinze types qui se préparaient de l'autre côté du terrain, les vingt mille qui s'éclaircissaient la voix à coups de Guinness et de U2 dans les tribunes, et surtout les centaines de milliers d'autres qui ont écrit l'histoire de ce pays et de cette province en particulier ne faisaient qu'un en ce jour de rugby. Et qu'à ce titre, chaque plaquage de l'Irlandais serait appuyé d'un force étonnante. Chaque percussion serait animée d'une puissance que leur seul physique ne pouvait laisser penser. Chaque mêlée réunirait protestants et catholiques sous la bannière de l'Ulster pour nous foutre sur le cul.

J'ai ressenti à Belfast une profondeur dans ce putain de sport qui nous a explosés à la figure, nous les petits Français aux maillots de Flash Gordon. Cette sensation-là, beaucoup d'internationaux vous en parleront. Non pas de celle de porter des maillots flashy mais de celle qui vous étrangle pendant les chants de l'Arms Park, de celle qui vous saigne pendant les hymnes de Murrayfield ou de Twickenham" L'impression au plus profond de vos tripes que les mecs en face de vous, tout en vous respectant autant que faire se peut, sont là pour régler des comptes avec leur Histoire, leur Peuple