Une fois l’an, toute la Flandre, à l’occasion du tour cycliste du même nom, se donne l’illusion qu’elle est toujours agricole. Puis, se félicitant de ce qu’elle est devenue, se convainc que son identité s’est forgée grâce aux exploits de ses propres coureurs à travers les labours. C’est une idée très ancrée dans la population flamande. Son héros, c’est Briek Schotte, un vieux monsieur de 80 ans qui a disputé cette épreuve à 20 reprises «une première fois en 1940 et une dernière fois en 1959». Le dernier des Flandriens aux yeux de tous les Belges: «Regardez mes mains, elles sont déformées à force de biner la terre et de couper le lin quand je travaillais dans la ferme de mon père.» Dimanche se disputera la 83e édition de cette classique qui pousse près de 1 million de Flamands en ce jour de Pâques (soit 10% de la population) au pas de gymnastique sur les bords des routes et des tronçons pavés. Malgré la rocambolesque arrestation, il y a deux jours, des favoris de l’équipe Mapei au départ de la dernière étape des Trois Jours de La Panne, sur injonction désordonnée du parquet de Courtrai (Libération du 2 avril), la Flandre se bousculera dans les fossés pour encourager les siens dans une foi sans faille, qui doit tenir encore au prestige de son clergé.
Il n'y a plus de Flandriens dans les champs. Mais le symbole terrien et identitaire est encore vigoureux. Par une sorte de prudence bien comprise de ses élites, la Flandre avait laissé le cyclisme en dehors de ses intérêts. M