Jusqu'ici, on se disait que Jean-Pierre Mouligné avait bien de la
chance. Tandis que les autres navigateurs engagés sur Around Alone brisaient leur mât, s'échouaient sur les hauts-fonds, trouaient leurs voiles ou, comme Isabelle Autissier, se retrouvaient la quille en l'air, le Français menait hardiment sa barque sur des mers agitées, taquinant même la poupe de bateaux bien plus rapides que le sien. Vainqueur des trois premières étapes de cette longue course autour du monde en solitaire, leader des classe II (1) avec huit jours d'avance sur le deuxième, la dernière étape entre l'Uruguay et les Etats-Unis devait être une formalité pour lui.
Et puis il y a eu ce bobo au genou. Une simple gêne au début, qu'il néglige. Mais la douleur s'intensifie, le genou gonfle; Mouligné finit par en envoyer une photo au médecin de la course. «Il m'a dit que j'avais une infection grave qu'il fallait immédiatement résorber, sinon on allait être obligé de m'évacuer du bateau.» La chance le quitte soudainement, et les huit jours d'avance qu'il possède sur l'Anglais Garside au général ne semblent plus si confortables.
Et parce que, sur un voilier, les coups de bambou ont souvent tendance à frapper en série, sa grand-voile n'a pas trouvé mieux que de se déchirer au même moment. Sous antibiotiques, il entame des réparations qui s'étalent sur plusieurs jours: «Je me suis senti comme un invalide avec une jambe de bois.» Hier, les nouvelles étaient rassurantes. Dans un message, il affirmait avoir «à peu