Rome de notre correspondant
A proximité du pénitencier de Rebibbia, dans la banlieue nord-est de Rome, Régis s'entraîne consciencieusement sur des bouts de terrain sans âme. Loin des centres de formation, il veille à conserver la forme en attendant de se montrer aux grandes écuries du Calcio (1) peut-être, aux clubs de fin de série C (troisième division italienne) plus sûrement.
Régis aimerait faire part de son ambition: troquer son enthousiasme de promesse camerounaise du ballon rond contre une existence de mercenaire du football international. Mais ses "grands frères" n'y tiennent pas: "Il ne peut pas parler, il ne sait pas ce qu'il doit dire", assure l'un d'eux, casquette sur le front, portable en main. Plus cordial mais tout aussi lapidaire, son tuteur, camerounais lui aussi, feint l'ignorance: "D'accord, moi, ici en Italie, je représente ses parents. Mais c'est son manager qui s'occupe de son avenir professionnel. Je ne sais rien des tests qu'il a déjà effectués ni des équipes auxquelles il va peut-être être présenté."
Seule certitude: comme des centaines de jeunes étrangers, Régis est bel et bien un "baby-calciatore", un de ses "enfants-football", âgés de 12 à 18 ans, plus ou moins arrachés de leur cercle familial au Ghana, au Nigeria, au Brésil ou ailleurs pour faire la tournée de clubs européens (2) en quête de la perle rare à bas prix. Destination privilégiée: l'Italie, avec ses centaines de clubs de jeunes et ses récompenses sonnantes et trébuchantes pour gamins doués