Fin de l'entraînement. Reprises de volée brutales et bruyantes pour quelques-uns, étirements de yogis pour les autres. Claude Le Roy zigzague au milieu de ses troupes bleu, black, beur, et pas spécialement alsaciennes. Il prend par l'épaule, conseille, motive, gronde, rassure. La parole circule, l'émotion affleure, comme si la troupe se serrait autour de celui qui a servi de paratonnerre devant la vindicte populaire, autour de celui qui a tout pris sur lui, jusqu'à l'agressivité raciste et antisémite d'une poignée de supporteurs.
Le Racing Club de Strasbourg est doublement dans la tourmente. Sportivement, il pointe aux derniers rangs. Et Le Roy est tout près de passer à la trappe. Rien là que de très normal au pays du foot bizness où l'entraîneur fait office de traditionnel bouc émissaire. Mais, cette fois, le dérapage est d'importance. Ancien sélectionneur du Cameroun et du Sénégal, Le Roy n'a cessé d'être accusé de recruter en priorité des Africains. D'où régulières livraisons d'excréments par colis postal et dégueulasses rumeurs d'affairisme (Le Roy: «Je n'ai jamais pris un franc sur un transfert»). Pire, dernièrement, suite à un début de championnat calamiteux, les Blacks de l'équipe ont été pris pour cible, Le Roy traité de «sale juif» sur les murs du stade et cinglé d'un «Va cramer à Auschwitz!» en pleine rue. Par mesure de rétorsion, les joueurs ont refusé de saluer le public lors du match contre Sedan, se sont congratulés, snobant même la banderole de prise de distanc