Le monde du vélo ne comprendra sans doute jamais pourquoi, à trois jours du départ du Tour 1998, un suiveur a pris le risque démesuré de se rendre en Irlande (où se disputent le prologue et la première étape) dans une voiture d'équipe siglée Tour de France et bourrée de plus de 400 flacons de produits interdits. Il aurait été plus sage d'attendre à Roscoff que le peloton revienne en France. Car les douanes françaises étaient bien renseignées. Le mercredi 8 juillet, Willy Voet, soigneur de Festina, est interpellé à l'aube par la «volante», alors qu'il passe la frontière à Neuville-en-Ferrain (Nord). Dans le coffre: 235 doses d'EPO, 82 d'hormones de croissance, 60 de testostérone, des corticoïdes et des amphétamines. A Dublin, dans la caravane, on chuchote. Une voiture manquerait à l'appel. Bruno Roussel, le directeur sportif de l'équipe, fait mine de rien.
Deux jours plus tard, une information judiciaire est ouverte pour importation en contrebande et circulation irrégulière de marchandises prohibées. Voet est mis en examen par le juge Keil et écroué deux semaines. Aux enquêteurs, il déclare avoir agi sur ordre de ses employeurs; il devait remettre les produits au médecin de l'équipe, le Dr Rijckaert. ça chauffe pour Festina, qui lâche son soigneur. L'avocat de Bruno Roussel, Me de Montbrial, tente une explication: «On aurait pris une voiture banalisée. Et nous aurions véhiculé seulement les produits dont nous aurions eu besoin. A moins qu'il y en ait eu pour tout le peloton.»
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