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Libération

Le rugbyman, un homme de corps

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Les rapports des joueurs entre eux et avec les femmes vus par une ethnologue.
publié le 23 juin 2001 à 1h20

Dans les tribunes, la mère du joueur vocifère en insultant copieusement l'arbitre. A ses côtés, la femme ou la compagne du joueur regarde posément la partie en supportrice obligée, mais réservée. Après le match, c'est à la mère et non à l'épouse que le joueur confie le soin de nettoyer les maillots pleins de boue, ce qu'elle fait depuis qu'il joue en minime. Mais lors de la troisième mi-temps, ni l'une ni l'autre ne sont invitées aux libations. Entre alors en scène la «groupie», qui participe aux agapes et à ses éventuels dérapages.

Patience. Telles sont les trois images féminines du rugbyman décrites par Anne Saouter, jeune ethnologue de 35 ans, dans son ouvrage: Etre rugby. Jeux du masculin et du féminin (1). L'auteure a d'abord travaillé sur le club de Bègles, toutes sections confondues, avant d'étendre son étude à l'ensemble des niveaux de pratique du rugby, jusqu'aux anecdotes des tournées internationales. Elle s'est fait accepter par le monde ovale à force de patience (2) et ses interlocuteurs en ont vite oublié qu'elle était elle-même une femme. «On ne peut pas parler du jeu avec nos femmes», s'est-elle entendu dire en cours d'entretien. La féminité s'est dissoute sous couvert de l'expert.

«Le rugby, c'est le père», avance Anne Saouter, en s'amusant de la façon dont l'encadrement traite les joueurs. «C'est un milieu très hiérarchisé où les relations d'autorité sont fortes. Les joueurs ont beau avoir 25 ou 30 ans, on les traite encore comme des gamins.» Les dirigeants de