Tokyo de notre correspondant
Assis sur les bancs du parc de Yoyogi, en plein coeur de Tokyo, Shoji et Hisao n'en reviennent pas. Pas un matin ne passe, depuis une semaine, sans que de grands gaillards à la peau blanche, en shorts et en baskets déboulent, au pas de course, devant leurs bicoques de fortune faite de cartons et de bâches plastique bleues. «Ils nous sourient et nous saluent. Moi, je préférerais qu'ils soient moins polis mais qu'ils courent un peu plus loin», grommelle l'un des deux hommes. Shoji et Hisao sont SDF. Ils se sont installés là depuis six mois, à l'abri d'un bosquet que les promeneurs japonais en goguette évitent afin de ne pas les déranger.
Bienvenue au Japon «made in World Cup», où l'afflux de supporters fait depuis ressembler les artères les plus célèbres de Tokyo aux rues touristiques de Bangkok. La capitale nipponne, où repérer un visage d'étranger dans la foule procure d'ordinaire un léger soulagement et l'étrange impression de n'être pas le seul à vivre en apnée dans cet archipel éloigné, vit depuis le début de la compétition avec ses fenêtres ouvertes. Les usagers japonais des transports commencent à s'habituer à voir des Mexicains en sombreros et des Suédois à la figure peinturlurée de jaune et bleu débouler dans les escaliers. Les vieilles dames nipponnes à la mise soignée regardent avec des airs d'ethnologues chez les Papous les enfants blonds aux yeux bleus haranguer leurs parents en anglais, en allemand ou en espagnol. Même la gérante du Ram