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Libération

Du hachoir à la lumière

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Ancien détenteur du Trophée Jules-Verne, skipper de «Geronimo», trimaran de 33 mètres, Olivier de Kersauson, trois participations à la Route du rhum, nous livre sa chronique de la course.
publié le 25 novembre 2002 à 1h52

La Route du Rhum est terminée et nous n'avons pas vu de course. Elle est passée du hachoir à la lumière avec une violence inouïe. Nous avons, d'une part, assisté à un massacre des grands multicoques, avec trois rescapés, et, d'autre part, vu Ellen MacArthur réaliser une course magistrale, dominant tactiquement Mike Golding, son concurrent le plus direct. C'est elle qui incarne l'esprit du Rhum. Car hormis ce mano a mano, il n'y a pas eu de tactique réelle. Nous n'avons pas vu de bateaux en doubler d'autres alors que c'est justement ça qui fait la particularité des courses. La tempête a trié le reste, de sorte que tout était déjà joué pour les multicoques.

Michel Desjoyeaux, le plus rapide malgré deux escales pour réparer, a pris plus de risques qu'en monocoque. Malheureusement pour la lecture de la course, il a franchi la ligne après. Lorsqu'on est obligé d'expliquer pourquoi on a gagné, ce n'est pas bon signe.

Fallait-il vraiment donner ce départ différé entre les deux catégories ? Le Rhum doit-il être réservé aux multi coques ? En 1978, ce débat monocoques-multicoques existait déjà. Après sept éditions, il n'est toujours pas tranché. Cette course a traversé une crise lourde, mais ce n'est qu'une crise qui va faire progresser les choses. Il ne faudrait surtout pas que cela conduise les marins à y renoncer. Après ce Trafalgar, certains ont décidé de mettre un terme à leur carrière solo. C'est leur décision. Mais, dans ce genre d'aventure, la peur existait et elle existe touj