«Geronimo» entamait hier sa dernière semaine, avec sa 57e journée de mer. Positionné par 18° 56' N et 36° 11' O, le grand multicoque d'Olivier de Kersauson (Cap Gemini Ernst & Young-Schneider Electric) était au près dans des alizés paresseux ne dépassant pas les 12 noeuds. «Geronimo» progressait à un peu plus de 15 noeuds. Les directions aléatoires des vents aujourd'hui et demain pénaliseront le bateau. Pour mémoire, «Orange» avait, lui, avalé les milles sur la fin du parcours.
Jamais la sensation d'être à la merci du destin ne m'a semblé aussi vive. Après 5 000 kilomètres dans la pétole, nous pensions trouver des vents plus soutenus. Ils sont faibles. La seule chose que l'on puisse encore faire, c'est de naviguer de notre mieux chaque minute pour aller le plus vite possible. Mais on fait la gueule, car ce qui nous est promis dans les prochaines heures est parfaitement incompréhensible. Il y a tout et son contraire : anticyclone, petite et grosse dépression. Il est impossible d'affirmer si nous pouvons passer ou pas. Toute rage serait inutile. Je peux me fâcher contre les gens qui me cassent les couilles, mais contre la météo, j'sais pas faire. Tout cela serait d'ailleurs d'un ridicule absolu, car la rage n'a jamais fait progresser un bateau. Pas plus que l'amertume. On me dit : «Quel suspens ! Vu de terre.» Je réponds que nous vivons dans un nid à emmerdes. Par-dessus le marché, des vents de sable rouge recouvrent winches et poulies. On progresse dans un alizé monotone et br