Il faut parler nettement : l'histoire qui suit aurait toute sa place dans la bibliothèque en acajou du Yacht Club de France, entre Louis Antoine de Bougainville et J. K. Jerome. Voilà les faits. Le navigateur Jean-Luc Van den Heede, seul à bord son voilier de 26 m (Adrien), le 5 janvier, démâte dans l'océan Indien. Il possède alors 18 jours d'avance sur le record du tour du monde à l'envers détenu par Philippe Monnet. Van den Heede rejoint Hobart, en Tasmanie, sous gréement de fortune. Pendant ce temps-là, dans le Maine-et-Loire, Jean-Marie Patier, 37 ans, professeur d'économie et chef d'établissement dans le privé («non confessionnel», précise-t-il), contacte par courrier électronique le marin. Ce dernier répond qu'il n'a que faire d'un équipier qui l'aiderait à convoyer son bateau en Europe, vu qu'il compte amarrer solidement Adrien sur un cargo «transporteur d'oignons» qui doit prochainement faire route pour l'Europe.
Mais l'armateur d'oignons se ravise. Il est question de bulbes qui ne peuvent attendre et autres arguments agricoles contre lesquels le marin ne peut lutter. Les autres armateurs contactés lui demandent en échange cent mille euros pour ramener le voilier. VdH n'a pas cette somme. Il y a de quoi se gratter la tête. Que faire ? Un mât neuf lui coûterait le double. Van den Heede tourne en rond, maudit les transporteurs d'oignons et puis trouve la solution. Un chaudronnier lui soudera trois gros tubes de chauffage central. Adrien a son mât : 18 mètres au lieu de