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Libération

Quand la réalité devient rêve

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publié le 28 août 2003 à 0h45

Trois, deux, un, partez. C'est Moktar qui a donné le départ, comme ça, sans prévenir. Il est au couloir un. Fadila est au cinq et Jérémie, au sept. Plutôt affûtés les garnements. Grosse envie de manger le frangin.

La bagarre est acharnée sur la passerelle qui conduit du Stade de France à cet ailleurs improbable, coincé entre autoroute et canal, le Forum mondial du sport. L'habituel béton a été peint couleur tartan et les lignes blanches des couloirs parfaitement tracées. A la place des traditionnels panneaux publicitaires qui jonchent les abords de la piste, des mots de collégiens et lycéens de Seine-Saint-Denis. Ironiques : «Je sue donc j'existe.» Philosophiques : «La compétition n'a lieu que contre soi-même.»

«Que de la balle!». Ici, c'est presque comme en vrai. Moktar, Jérémie, Fadila et les autres s'y croient à fond. Dans moins d'une semaine, c'est la rentrée, et ils sont champions du monde avant d'affronter la nouvelle maîtresse. Surtout Moktar, catégorie CM2. Sa «vedette» à lui, c'est Hicham el Guerrouj, l'émir du demi-fond marocain.

L'autre jour, Moktar l'a vu sur l'un des deux écrans géants installés par le Forum. Histoire que les Dionysiens (les habitants de Saint-Denis) et tous les autres puissent un peu goûter au rêve. «Que de la balle !» a dit Moktar. En plus de l'image, il y a le son. Lorsque dans le stade, ça frotte ou ça passe, ça exulte où ça crispe, ici, on entend tout.

La clameur ou les sifflets renseignent sur la nature de l'événement. Des bravos interminables