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Libération

L'Italie enterre son héros sans se remettre en question

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publié le 19 février 2004 à 23h11

Cesenatico, envoyé spécial.

Dans la petite église de Cesenatico, face au cercueil de Marco Pantani, entouré de sa famille et de quelques vedettes du sport transalpin, dont Alberto Tomba, Mario Cipollini et Gianni Bugno, monseigneur Lanfranchi a tenté hier une échappée solitaire. Alors que plusieurs milliers de tifosi s'étaient rassemblés à l'extérieur, le long du canal au coeur du petit port de l'Adriatique, pour écouter dans le froid la messe funèbre et rendre un dernier hommage au «Pirate», l'évêque de Cesena a ainsi lâché : «La mort de Marco invite à une série d'examens de conscience sur le sport et tout ce qui tourne autour du sport. Un homme vaut plus que ses victoires et ses défaites, un homme vaut plus que le cyclisme, (...) un homme ne peut être sacrifié à aucune logique d'exploitation.» Et d'insister, en dénonçant au passage toute «idolâtrie»: «Il faut récupérer une vision du sport qui ne soit pas seulement compétition et succès.»

«Calvaire». Peine perdue. Le prélat a vite été rattrapé par le peloton des inconditionnels du sport spectacle dont Marco Pantani était l'un des héros. «Son calvaire a commencé à Madonna di Campiglio», a proclamé entre deux alléluias, le maire de Cesenatico, Damiano Zoffoli, interrompu par une salve d'applaudissements. Pour les fidèles présents, le Pirate reste en effet une victime dont le sacrifice aurait été consommé le 5 juin 1999 sur le Tour d'Italie, lorsque les commissaires l'expulsèrent de la course en raison d'un hématocrite explosif.