Hier à 13 heures, Geronimo (Cap Gemini-Schneider Electric) se trouvait par 58°04 S et 98°12 W après 38 jours de navigation et filait à 19 noeuds vers le cap Horn qu'il devrait franchir mardi. Depuis qu'il navigue, Olivier de Kersauson n'avait jamais vu chose pareille. Après dix jours de piaule, voilà Geronimo forcé de ralentir pour ne pas arriver trop vite sur un mur de vent qui risquerait de l'éjecter du fameux passage. Paradoxal alors que la fatigue fait des ravages à bord et que le Horn se trouve à 1000 milles. C'est aussi l'avance qu'il compte toujours sur le record de Bruno Peyron.
Notre quotidien est fait de violence, de fatigue et de peur. Sommes depuis dix jours entre deux, trois ris, ou à sec de toile. Samedi fut la seule journée où nous avons enfin mis toute la toile pour quelques heures. C'est à s'arracher les cheveux puisqu'on est alors tombés dans une molle (zone sans vent). Jamais nous nous étions fait branler comme ça. Toujours au travers, avec des vents de sud et jamais de vents d'ouest. On est maudits. Jamais vu un truc pareil. Dix jours de survie. Est-ce cela la navigation ?
Si oui, alors je veux bien arrêter tout de suite. En regardant la tête des hommes je me disais en moi-même, c'est pourtant vrai putain qu'on va tous crever. On va y rester, c'est sûr. Mais c'est pour quand ? Là, tout de suite ? Ou alors à la prochaine lame ? J'ai bien failli décrocher de la course à deux reprises. Si on continue ainsi on va finir par tous se tuer que je me disais. Pour au