Voilà Kersauson et son équipage engagés sur l'autoroute du nord. Au 45e jour de mer, Geronimo a laissé derrière lui les tourments des mers du Sud et les quarantièmes rugissants. A bord, le moral remonte à un rythme aussi spectaculaire que celui des températures (17 °C). Le navigateur français (hier par 37°54 S et 46°54 W) est toujours en avance sur le record détenu par Bruno Peyron, mais très en retard sur celui de Steve Fossett établi il y a une semaine. En attendant des vents favorables, il remonte «au près mais au plus court».
Nous revenons du grand nulle part. Le pays vague où la vague se déplace à 35 noeuds. Dix jours d'abrutissement et de massacre. On a beau avoir un bateau raffiné et très marin, cela restait une Ferrari sur un parcours pour quatre roues motrices. Qu'est-ce qu'on a fait ? Ben rien. On a navigué à la vitesse d'un monocoque. Geronimo était hors de l'eau et il faut imaginer un bateau faisant la surface d'un cours de tennis qui se déplace dans dix jours de chaos maritime. On est sortis cabossés. Et tout cela pour rien, c'est cela qui est terrible. Tout cela pour marcher à des vitesses misérables avec la hantise de casser les hommes et le matériel. J'ai fait un paquet de tours du monde, mais jamais je ne retournerai, à cette époque de l'année, là-bas dans ces mers-là. Dix jours d'épouvante. Le cauchemar a pris fin, on est enfin réveillés. Il fait 14 °C. Aujourd'hui, la satisfaction des hommes, c'est enfin d'enlever les bottes et de marcher pieds nus. C'est l