Libération a demandé à deux historiens spécialistes des religions et de la nation de dresser le portrait de la France de juillet, alors que le vélo tricolore prêche depuis vingt ans dans le désert (1985, dernière victoire de Bernard Hinault). Se dessine une France sous l'emprise d'un prophète américain, Lance Armstrong. Cette France, qui n'est pourtant pas repliée sur elle-même, prendrait même un plaisir extrême durant trois semaines à ressasser son passé. Odon Vallet, universitaire et énarque, et Patrick Cabanel, professeur d'histoire contemporaine à Toulouse-Le Mirail, expliquent ce phénomène identitaire au cours duquel le pays se met à écrire à la craie, comme l'ardoisier du Tour de France.
Alors qu'on célèbre le centenaire de la séparation de l'Eglise et de l'Etat, la France de juillet est-elle toujours fidèle à la religion du vélo ?
Odon Vallet. Jacques Goddet, patron du Tour (il l'a dirigé pendant soixante ans, ndlr) n'était pas du tout religieux, quant à Pierre Chany, le grand spécialiste du cyclisme de l'Equipe (cinquante tours de France, ndlr), c'était un vieux laïc ! Pour ce qui est du côté religieux, le Tour de France aime bien la Vendée et le président de son conseil général (Philippe de Villiers, ndlr)... La plupart des coureurs n'ont jamais foutu les pieds à la messe et le public du bord de la route n'est pas spécialement religieux. Le monde du vélo n'est certainement pas un monde de gauche, mais les organisateurs de courses ont eu la grande sagesse de ne jamais politiser leurs épreuves.
Patrick Cabanel. Les pays catholiques génèrent un anticléricalisme qui n'existe pas dans les pays protestants. C'est auss