Infatigables Sisyphes aquatiques, nageurs et nageuses enchaînent les longueurs. Encore et encore. Un chronomètre dans chaque main, Philippe Lucas surveille les lignes trois et quatre, où nagent Angela, Kevin et une certaine Laure. Il donne les temps, arpente les cinquante mètres l'air concentré, presque renfermé, pas plus perturbé que ses athlètes par la pluie et l'orage qui s'abattent sur la région.
Même si, le plus souvent, c'est flou, voire coupé, qu'il apparaît sur les photos, centrées sur sa championne actuelle, Laure Manaudou, on le reconnaît sans problème. De bas en haut : tongs, bermuda et débardeur rouges, grosse montre et bracelets aux poignets, d'innombrables chaînes autour du cou sur lesquelles pendent quelques médaillons, dont deux croix, une barbe de trois jours très travaillée, plusieurs boucles d'oreille, de larges lunettes de soleil et une longue chevelure claire. Un look de biker plus attendu sur la route 66 qu'au bord d'un bassin. Philippe Lucas est ainsi. Depuis toujours, clame-t-il.
Une enfance «sans histoire» à Melun (Seine-et-Marne), où il est né, entouré par des parents «très gentils» qui ont accepté qu'il arrête l'école à l'âge de 16 ans pour suivre sa voie. «Je savais ce que je voulais, j'étais sûr de moi, et ils l'ont compris. C'est ça le plus important. Si mon gamin veut devenir plombier, super ! Qu'il le fasse, du moment qu'il est sûr de son choix.» Pour lui, après dix ans passés dans l'eau pour parvenir à un modeste niveau régional, le choix d'ent