Vendredi soir, au début de la première faena à Las Ventas de l'Arlésien Medhi Savalli, la musique a joué. Du jazz. Cameleon, de Herbie Hancock. Evidemment, ce n'était pas la Banda de Madrid. Elle ne joue jamais pendant le travail des toreros. A la Bourse du travail d'Arles, des musiciens répétaient dans une pièce contiguë à celle qui sert de siège au club taurin La Muleta, où la télévision donnait en direct la novillada. A 1 018 km de là, l'abattage et le swing du prometteur novillero des barres de HLM du quartier de Barriol, étaient en train d'enthousiasmer les aficionados madrilènes. Il toréait à Madrid pour la première fois. Il avait avec beaucoup d'aplomb et dans un espagnol encore approximatif, affirmé rondement au micro de Via Digital, avant la course : «Je suis venu pour mettre le feu.» Ce qui est la moindre des choses lorsque l'on a un CAP d'électricien. Medhi Savalli a bluffé Madrid par son culot, et sa joie manifeste de toréer s'est propagée sur les gradins.
Il est allé attendre Potrero, un novillo très sérieux de Espartaco, à genoux à la sortie du toril, l'a toréé à la cape par gaoneras, l'a banderillé avec enthousiasme, l'a brindé à Paquito Leal, son père en tauromachie, l'a attendu à la muleta au centre piste, avec deux passes changées dans le dos, l'a soumis avec autorité jusqu'à ce que Potrero baisse d'un ton. Il ratera deux estocades. Il aurait, sinon, largement coupé une oreille. Il fera un tour de piste sous l'ovation. Son deuxième novillo manquait de jus. C