Menu
Libération

Un chemin de Croate

Article réservé aux abonnés
publié le 29 octobre 2005 à 4h18

On l'avait croisé en mai, à Paris déjà, Porte d'Auteuil, un après-midi de défaite face à Mariano Puerta, errant en solitaire dans un couloir. «Je n'y pouvais pas grand-chose.» Le Croate Ivan Ljubicic, tête de série (n° 4) à Bercy, était alors déjà ailleurs. Traînant son physique d'échassier (1,93 m) déplumé, il disait : «Le tennis, c'est souffrir». D'un ton calme, dégagé. Deux ans plus tôt, l'air de s'en foutre mais choisissant ses mots, il avait réglé le compte d'Andy Roddick, ce golden boy du tennis américain qui lui ressemble si peu et qui venait juste de lui jouer un rodéo en plein US Open : «Il va aux toilettes pendant un quart d'heure, il chauffe le public, il met la pression sur les juges de lignes... Je ne vois pas trop comment on peut apprécier un mec pareil.»

Mise à l'abri. Ljubicic dégage un quelque chose qui ne se vend pas, et ne donnera jamais au Croate le dixième du lustre qui s'est attaché aux pas de son compatriote et prédécesseur Goran Ivanisevic. Il a déclaré une fois : «Je sens au fond de moi une sorte de puissance. Je ne dis pas que je repense aux moments difficiles quand je suis sur le court. Mais je sais que cette force est là.» Il a grandi en Bosnie, à Banja Luka. En 1992, son père, ingénieur, l'a mis à l'abri. «Nous avons pris un avion-cargo humanitaire pour Belgrade, a-t-il détaillé au quotidien l'Equipe. Le bus qui devait nous emmener en Croatie partait à minuit. Nous sommes restés à l'attendre, mon frère et moi, collés à notre mère, comme notre père