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Libération

Aïeul ovale en première ligne

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publié le 12 mai 2006 à 21h12

Il voyage léger, avec un petit sac de toile blanc cassé. Il n'a pas eu besoin d'aide pour monter dans le train de la Coupe du monde de Rugby 2007. Direction Le Havre, ville où fut créé le premier club de rugby français en 1872. Le costume bleu-gris impeccable, deux rosettes, une rouge et une bleue, à la boutonnière. Gérard Dupont parle d'une voix chevrotante qui se perd dans les aigus. Il a 84 ans et 57 grands enfants plus ou moins baraqués, aux oreilles décollées ou pliées, aux joues un peu rouges, surtout en fin de parcours. Tous l'appellent «le Colonel», en bombant le torse. Après la résistance en Espagne, l'Indochine et l'Algérie, Gérard Dupont a fait dans le maintien de rugbymen à Joinville, au bataillon, en 1960. Pour avoir pratiqué «modestement» le rugby du côté de Tarbes et de Saigon, il a chaperonné pendant sept ans une troupe de margoulins.

Châteauneuf-du-pape. Le Colonel démarre sa tournée des popotes dans le wagon 2. Une centaine d'internationaux ont pris place, casant difficilement leurs grandes cannes sous les sièges rouge velours de la première classe. Les magnums de châteauneuf-du-pape, cuvée Anaïs 2004, sont débouchés, des tornades ont dévasté les plateaux de cochonnailles basques. «Messieurs, j'ai mis le blazer en votre honneur. Quel plaisir j'ai de vous voir», le Colonel fait halte à hauteur de Gérald Martinez ­ président de l'Amicale des anciens internationaux ­, Jean Gachassin et Karl Janik, «c'est inoubliable. Je pourrais fouiller dans ma mémoire, je vou