Menu
Libération

Aurelia Ditton jette l'encre à bord

Article réservé aux abonnés
publié le 13 novembre 2006 à 0h04

Saint-Malo envoyé spécial

A quatre jours du départ de la Route du rhum, à la nuit tombante, quatre garçons s'affairent à genoux avec une perceuse sur le pont d'un monocoque. Un winch (petit treuil à main) flambant neuf, couché, luit sous une lampe halogène. Aurelia Ditton repasse dans l'obscurité de la cabine chercher un tournevis. Ses équipiers la soupçonnent plus ou moins humoristiquement d'avoir plutôt paumé l'outil que de l'avoir rangé. Tandis que la chignole se remet à chanter, la jeune Anglaise de 26 ans ressort sautillante et se dirige vers la plage avant, pour s'expliquer, au calme, sur l'émotion qu'elle a suscitée auprès des autres skippeurs.

Criminelle. Cette artiste, dernière inscrite, allait prendre le départ de la course pour écrire son journal de bord à même les parois intérieures du bateau. Après l'arrivée, son voilier serait littéralement coupé en deux dans sa longueur pour livrer enfin à la vue de tous, ses émotions solitaires dans deux musées, l'un aux Etats-Unis, l'autre en Amérique du Sud.

Elle s'amuse bien, rit aux éclats, a les yeux fiévreux de l'impatience, de l'excitation, du caprice. «J'ai reçu deux mails en français : des gens qui me supplient de ne pas découper le bateau, ils sont prêts à me l'acheter de suite !» La criminelle se moque des sentimentaux : «Je suis navigatrice et artiste. Pour moi, ces deux activités sont indissociables. Je vais écrire dans le bateau tout ce qui me passe par la tête, je recommencerai si ça s'efface, on ne pour