Athènes, 28 août 2004. Hicham el-Guerrouj, à presque 30 ans, vient d'avaler la finale du 5 000 m, quatre jours après avoir remporté le 1 500 m des JO. Il roule des yeux comme des billes à la manière d'un gamin visage mi-extatique mi-incrédule , il brandit devant les caméras son index et son majeur. Il indique «deux», le nombre de médailles d'or olympiques qu'il empoche. Lui qui, par extraordinaire, n'en avait jamais raflé une, alors qu'il avait gagné tout le reste. Ce 28 août-là, El-Guerrouj dispute sa dernière course. La minute d'après, il va cesser d'être un athlète, même s'il mettra un temps fou à se résoudre à cette évidence. Vingt et un mois pour s'avouer qu'il n'en voulait plus.
Servitudes. Le gamin de Berkane, dans le nord-est du Maroc, n'avait que 13 ans quand il disputa sa première course, 16 ans quand il devint champion du Maroc de cross (chez les cadets). C'est à cet âge qu'il intégra le centre national d'athlétisme de Rabat. El-Guerrouj a passé sa première vie à courir. Aziz Daouda, directeur technique national de l'athlétisme marocain, dit un jour : «Ce qui le différencie des autres, c'est qu'il y a cru très jeune. Il s'est voué tout entier à la course à pied.» El-Guerrouj a souvent évoqué les servitudes de l'athlète de haut niveau, l'ascétisme extrême qu'il s'est infligé : «J'ai sacrifié ma jeunesse à l'athlétisme», a-t-il souvent répété. Alors pourquoi continuer à sacrifier sa vie d'adulte quand on a tout gagné ?
Frustration. Entre 1996