Menu
Libération

Des trotteurs aux semelles de vent

Article réservé aux abonnés
publié le 27 janvier 2007 à 5h41

Depuis trois ans, les courses au trot françaises sont devenues un jeu de «D» ­ D comme déferrés. Sur l'hippodrome de Paris-Vincennes, un déferré est un cheval qui court sans que ses sabots soient munis d'une «protection rigide et visible qui assure la fonction [de fer] pendant tout le temps de la course». Dimanche, au départ du Prix d'Amérique Marionnaud, ils devraient être quatorze sur dix-huit à courir déferrés. Les autres sont bons pour se rendre au départ avec des pieds de plomb. Car ce nombre record de D parmi les candidats à l'Amérique montre que le déferrage est aux épreuves de trot ce que le fosbury flop a été au saut en hauteur : une évolution décisive et durable. Sans poids aux pieds et sans le frottement du fer sur le sol dur des pistes de trot, les jambes sont plus légères et rien ne ralentit le mouvement. Plus d'amplitude, plus de vitesse et aucun risque de coupure lorsque antérieurs et postérieurs se frôlent : on comprend pourquoi les chevaux gagnent facilement 1 seconde au kilomètre (ce qui représente un gain de 30 mètres sur un parcours de 2 100 mètres) lorsqu'ils sont déferrés.

Le déferrage est un immense progrès dans la quête de vitesse des chevaux de course. Mais ce qui est amusant, c'est qu'il est aussi un retour en arrière de onze ou douze siècles. Pendant l'Antiquité, les chevaux se mesuraient pieds nus lors des nombreuses courses. Les Grecs les protégeaient parfois d'une sorte de sandale de cuir et les Romains munissaient leurs chevaux de