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Libération

Plein les pattes, mais aussi plein les yeux

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Ultra-trail. Le tour du Mont-Blanc est une épreuve exigeante dans un paysage exceptionnel.
publié le 27 août 2007 à 9h22

Il ne leur reste plus guère qu’un marathon à courir. Donc presque rien. Mais il est 23 heures et, quand ils émergent de l’obscurité - d’abord on ne voit que leur frontale, puis le corps s’esquisse à la faveur de la pleine lune, les bâtons de course, le mini-sac à dos, un bidon sous chaque épaule -, cela fait déjà une nuit plus une journée qu’ils sont partis de Chamonix. Depuis vendredi à 18 h 30, ils courent, ou marchent quand la côte ou la fatigue l’imposent. Alors, parmi ceux qui ont résisté à la fatigue, l’absence de sommeil, les crampes, les coups de barre, et sont arrivés jusqu’ici, à Champex (Suisse) à 122 km du départ et 1 477 m d’altitude, ils sont nombreux ‚ceux qui boitent ou qui ont l’air un peu hagards. La plupart clignent des yeux, un peu perdus avant d’entrer dans le grand chapiteau blanc disposé là pour les accueillir, les soigner, les réparer, les nourrir.

Dans l'air, si chaud après la fraîcheur de cette deuxième nuit en montagne, se mêlent l'odeur des baumes à l'eucalyptus et celles des pâtes bolognaise. On cherche des yeux le parent ou l'ami, avant même de s'enquérir des kinés, podologues et médecins, des toilettes ou des matelas où s'allonger quelques heures. Ils veulent puiser dans ces moments avec leurs proches la volonté et l'énergie de repartir. Mais pour Bertrand, 44 ans, venu de Normandie, c'est la fin de l'aventure. Pourtant, moral et envie sont intacts, et son visage est étonnamment lisse, comme nettoyé de tout souci par l'effort extrême. Mais