Dans un silence de catacombes, la foule quittait le stade au pas du laboureur comme si le ciel et la patrouille de France lui étaient tombés sur la tête. Les enfants reniflaient leur déception, les femmes s’agrippaient au bras de maris dépités qu’une bière à 7 euros s’évapore aussi rapidement. Alors tomba le SMS de Sébastien Chabal : «Minuit, kom dab».
Il m’attendait au Petit Ramoneur, cuisine familiale et vins de pays, un restaurant tenu par sa tante Alice, rue de la Fausse-Croisée-Redoublée dans le Marais.
Seb, je l’ai connu en primaire, à l’école Zélie-Péguillan de Valence. Il avait évidemment gagné le surnom de «Cocotte» et déjà, aux billes nous faisions équipe. Depuis que son numéro d’homme canon remplit le Bernie Circus, nos rencontres exigent des ruses de Sioux.
Coudes plantés sur la nappe à carreaux rouges et blancs, Seb avait attaqué la spécialité de tante Alice, le roudoudou du bûcheron, un gigot cru, largement piqué à l’ail et servi avec une purée de piments d’Espelette. Dans sa tenue de camouflage, tignasse ramenée dans un bonnet rasta, barbe teinte au henné qui lui donnait un petit air de Négus aux hormones, il m’invita à prendre place sans cesser de déchiqueter la barbaque. Entre ses battoirs le quartier d’agneau ressemblait à un épi de maïs à la vapeur.
«Tu veux connaître le responsable de la défaite ?, mâchonna Cocotte en déglutissant.
— Les Français ne dénoncent pas, ils renseignent. Vas-y !
— Un crétin de diététicien. Un soi-disant toubib qui depuis deux mois nou