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Libération

Bobby Fischer, le roi est mort

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publié le 19 janvier 2008 à 2h00

Un an par case. Le plus mythique chevaucheur des 64 cases est mort, étrangement, forcément, à 64 ans. Bobby Fischer s'en est allé, hier, en Islande. Reclus sur son île. Perdu après avoir fait cavalier seul, désarçonné par une histoire qui l'a fait trop vite rentrer dans l'Histoire. Claquemuré dans son monde échiquéen après avoir explosé des horizons, artistique ou politique.

Les échecs perdent à la fois leur roi scintillant et leur fou vacillant. Les échecs se découvriront sans le poids symbolique d'un personnage qui naviguait entre Zweig et Nabokov. Sans l'ombre encombrante d'un homme emprisonnant les échecs dans le complot et la perdition. Fischer ou le destin d'un homme-jeu, d'un destin hors-jeu.

L'homme contre le système

«Il a préfiguré le joueur pro, consacrant toute son énergie, seul, au jeu, dit le joueur d'échec français Joël Lautier. Le plus grand de tous les temps, battant vingt grands maîtres d'affilée, trustant huit titres de champion des Etats-Unis.» Un génie «dont les parties furent ce qu'une symphonie inédite de Mozart serait à un amoureux du classique», souffle l'Anglais Nigel Short. Son plus beau récital, le taciturne créateur le donne à Reykjavík, en 1972. Au coeur de la guerre des deux mondes, lui, un yankee individualiste, un fantasque fantastique brise vingt-quatre ans d'hégémonie soviétique. Annihile une génération de suprématie intellectuelle du communisme, en retournant, façon aïkido, «cette gymnastique de l'esprit», dixit Lén