«Lève les bras, lève les bras !» crient les photographes. Ce jour de novembre 1956, à Melbourne, Harold Connolly garde les mains dans le dos sur la plus haute marche du podium. L'Américain vient de décrocher, au dernier essai, la médaille d'or du lancer du marteau. Avec un jet de 63,16 mètres, il devance son adversaire le plus coriace, le Russe Michael Krivonosov. Depuis des mois, les deux hommes se disputent, centimètre par centimètre, le record du monde. Connolly cède enfin aux injonctions des reporters et l'on découvre son bras gauche atrophié. Une malformation de naissance aggravée par plusieurs accidents en jouant au foot ou en pratiquant la lutte. Histoire de ménager le membre cabossé, le jeune homme a choisi l'athlétisme.
Connolly et Krivonosov auraient pu être coiffés par un troisième homme, l'Américain Cliff Blair. Hélas, Blair a adressé depuis Melbourne quelques articles à un quotidien de Boston. Pris par la patrouille des ayatollahs de l'olympisme, gardiens du temple d'un amateurisme pur et dur, il a été exclu pour professionnalisme.
Handicapé côté gauche, Connolly n'en possède pas moins un coeur. Et surtout une excellente vue. La Tchèque Olga Fikotová, toute fraîche championne olympique du lancer du disque, lui tape dans l'oeil. En pleine guerre froide, quelques mois après l'intervention soviétique à Budapest, le sport constitue un enjeu politique. Qu'importe.
La dimension quasi géostratégique de leur idylle fait les gros titres. L'amour franchit le Rideau d