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Libération

De la polio au podium

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publié le 21 août 2008 à 4h41

Elle est grande, belle et développe sur la piste une foulée d'une parfaite harmonie. Dès son entrée en lice au Stadio olimpico en 1960, le public romain, sous le charme, baptise Wilma Rudolph «la gazelle». Vingtième enfant d'une famille miséreuse du Tennessee, le bébé, prématuré, ne pèse guère plus de deux kilos lorsqu'il naît en 1940. Sa mère n'est pas autorisée à accoucher à l'hôpital réservé aux Blancs et les parents, sans le sou, ne peuvent faire appel au seul médecin noir de la ville. A quatre ans, la gamine survit à une double pneumonie, puis, à six ans, une attaque de polio paralyse sa jambe gauche. Toute la famille la soutient dans ses exercices quotidiens pour l'aider à récupérer l'usage de ce membre atrophié. Ainsi, très jeune, Wilma joue au basket avec adresse malgré une épaisse chaussure orthopédique. Un soir de match, elle rentre à la maison, retire l'appareillage puis se met à courir comme une dératée. Miracle non homologué par les instances vaticanes. Orientée par son école vers Cliff Temple, entraîneur réputé de l'université de Nashville, elle décroche une médaille de bronze avec le relais 4 x 100 m américain aux Jeux de Melbourne en 1956.

Quatre ans plus tard, ses jambes interminables, parées d'une légère attelle à la cheville gauche, la propulsent trois fois vers l'or avec une grâce surnaturelle. La sprinteuse domine le 100 et le 200 mètres mais surtout, en finale du relais, après un passage de témoin chaotique, remonte cinq mètres sur l'équipe