C'est une année sans. Une année de vide et de méditation où il fait bon laisser dégorger le sel des navigations passées et les humeurs noires des projets avortés. On est en 2005 et Marc Thiercelin s'installe en ermite au sommet d'une colline. A une encablure du sémaphore, son cabanon domine la baie de La Ciotat et ouvre sur une mer qu'il ne s'empresse surtout pas de reprendre. Il n'y a ni électricité ni eau courante. Il monte bidons et provisions à dos d'homme. Son dernier sponsor l'a laissé en rade. Et pour arranger le tout, il boite bas, tibia et péroné fracturés «lors d'une fête, en dansant». Comme s'il était des heures sombres où même le plaisir finissait en vieillerie au col du fémur fragilisé.
Ni radio ni télé, juste la Grande Bleue au loin et ses derniers terrains vagues hantés par les fantômes de ses vaisseaux. Il imagine, il réfléchit, il met au clair ses idées. Thiercelin se présente souvent «comme un manuel et non comme un intellectuel». Disons plutôt qu'il garde une sensibilité artiste et un sens de l'intérêt général qui détonnent dans un univers de skippers qui se peuple, aujourd'hui, de sportifs rigoristes et d'ingénieurs à oeillères. L'ancien élève de l'école Boule qui voulait devenir luthier «pour faire chanter les arbres», célèbre régulièrement «l'intelligence de la main». Là, depuis son nid-de-pie, il s'énerve de cette France qui continue à tourner le dos à l'univers maritime. Convaincu et convaincant, ce communicateur calm